J’avais quinze ans et la passion des armes,
Un beau fusil tout neuf et tout luisant.
J’aurais voulu connaître les alarmes
Et les combats de tout soldat vaillant.
Mon père était de la garde civique,
Pour son ardeur on l’admirait beaucoup.
{Ah mes amis ah quel plaisir unique,
Quand on voyait papa tirer son coup} BIS
Un beau matin je lui dis petit père,
J’ai mes quinze ans et j’voudrais essayer
Le beau fusil qu’naguère avec ma mère
Tu mis neuf mois à m’pouvoir fabriquer.
Mon père me dit d’une voix martiale
» Ta noble ardeur me réjouit beaucoup,
{Voici mon fils, voici toujours cinq balles,
Va-t-en mon fils, va-t-en tirer ton coup « } BIS
En ce temps là vint un tir à la mode,
Qui s’établit je crois rue du persil,
Je m’en fut donc vers cet endroit commode
Pour essayer mon excellent fusil.
Toutes les cibles étaient belles et roses,
Mon beau fusil se dressa tout à coup.
{Je déchargeai et je fis une rose,
A mes amis qu’c’est bon le premier coup.} BIS
En peu de temps ma renommée fut grande,
De nobles dames se disputaient l’honneur
De chatouiller avec leurs mains fringantes,
Le beau fusil d’un si parfait chasseur.
Toutes les nuits j’étais à l’exercice,
Ma cartouchière n’était jamais à bout.
{Mais maintenant j’use d’un artifice,
Je ne veux plus par nuit tirer qu’un coup.} BIS
Et maintenant l’beau fusil qui naguère,
A de si haut faits si souvent abusé
Repose en paix au musée de la guerre,
Où il surmonte deux vieux boulets usés.
Il a connu tant de chaudes alarmes
Et tant de combats livrés coup sur coup
{Que si parfois il verse encore une larme,
C’est par regret de n’plus tirer son coup.} BIS